Procès APF-Me Bleitrach c/ Ministère de la justice : un jugement en total décalage avec les mentalités !

Dans l'affaire en discrimination opposant l'APF et Me Bleitrach au Ministère de la justice, le tribunal administratif a rendu son verdict le 5 avril : il déclare irrecevable l'association et déboute la plaignante. Les attendus du jugement, que l'association vient de recevoir, démontrent un réel archaïsme de la part des juges. Alors que la France vient de mettre en place la Halde et a fait de la lutte contre les discriminations une priorité, la décision du tribunal administratif montre un vrai décalage entre la volonté politique et l'application du droit. Révoltées par ce jugement, l'APF et Me Bleitrach ont décidé de faire appel !

Rappel des faits :
Handicapée suite à une poliomyélite, et en fauteuil roulant depuis quelques années, Maître Marianne Bleitrach, avocate au barreau de Béthune, éprouve les plus grandes difficultés à exercer sa profession parce que la plupart des tribunaux du Pas-de-Calais, dont elle dépend, sont inaccessibles. De fait, elle doit parfois plaider dans le hall ou sur le trottoir. Une véritable humiliation pour cette avocate qui n'a le choix qu'entre demander d'être "portée" afin d'accéder à la salle d'audience ou refuser le dossier de clients c'est-à-dire ne plus exercer son métier ! L'audience s'était tenue au tribunal administratif de Lille le 22 mars dernier.

 

Les attendus :
Pour le tribunal administratif de Lille,
- il n'y a pas rupture d'égalité puisque Me Bleitrach est une citoyenne comme une autre. Le tribunal fait ici une application très partielle du principe d'égalité de traitement, oubliant le pendant de ce principe reconnu par le Conseil d'Etat : à situation différente, traitement différent. Ainsi Me Bleitrach étant handicapée, le traitement aurait dû être la mise en accessibilité des tribunaux.
- il n'est pas dans la mission de service public de la justice de rendre ses instances accessibles, l'Etat n'est donc pas responsable. Une façon de dire que l'inertie n'est pas fautive...alors que justement la notion de discrimination indirecte impose une obligation d'agir pour faire cesser l'inégalité de traitement.
- l'APF est irrecevable puisque l'inaccessibilité des tribunaux ne porte pas préjudice à l'association. Le tribunal remet de fait en cause l'objet même de l'association, la reconnaissance et la défense des droits des personnes en situation de handicap, parmi lesquels l'accessibilité est un enjeu déterminant.

 

Au-delà du cas de Me Bleitrach, l'APF tient à souligner que cette affaire concerne de façon plus large tous les justiciables en situation de handicap qui, du fait de l'inaccessibilité des tribunaux, ont les plus grandes difficultés à faire exercer leurs droits au sein même des instances appropriées.

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