Se faire aider à domicile est-il devenu un luxe ?

Non, aider à domicile les personnes et les familles ne doit pas devenir un luxe. Les structures d'aide et de soin à domicile, organismes mutualistes, associations représentatives d'usagers, rassemblées dans un collectif le martèlent depuis plus d'un an déjà. Pourtant, l'Etat reste sourd aux appels au secours répétés des professionnels et des bénéficiaires. Pourquoi un tel silence, laissant tout un secteur en pleine incertitude sur son avenir ? Un secteur dont on sait qu'il répond aux besoins de nos concitoyens, qu'il est porteur d'enjeux sociétaux et qu'il constitue un formidable vivier d'emplois.

 

L'aide à domicile, portée par les acteurs de l'économie sociale et solidaire, est confrontée aux conséquences de la crise économique et aux difficultés des financements publics. Le transfert vers les départements des charges liées aux  politiques sociales sans contrepartie financière, des choix politiques peu transparents dans le domaine de l'aide aux personnes fragiles et des choix budgétaires aveugles (suppression des exonérations « services à la personne » dans la loi de finances 2011) mettent en danger les services d'aide à domicile publics et privés non lucratif et leur mission d'utilité sociale. D'autant plus que les services ont réalisé un important effort de professionnalisation et d'encadrement. Les coûts inhérents doivent être reconnus dans les prix de revient intégrés par l'Etat, les Caisses de Sécurité sociale et les collectivités locales.

 

Chaque année c'est 220 millions d'heures effectuées, soit plus de 2 millions de personnes aidées ou soignées sur leur lieu d'habitation par des travailleurs sociaux, des infirmiers, aides soignants, aides à domicile, auxiliaires de vie... De la naissance à l'accompagnement de fin de vie, du soutien à domicile des personnes en perte d'autonomie ou en situation de handicap à l'accompagnement des familles, des solutions concrètes, innovantes, professionnelles sont apportées au quotidien par les structures publiques (CCAS/CIAS) ou privées à but non lucratif (associations, mutuelles, SCOP).

De Mayotte à Paris, des plus petits villages ou plus grandes villes, leur maillage complet du territoire est garante d'équité sociale et de dynamisme économique. Les services solidaires font partis des premiers employeurs dans de nombreuses régions. Dans la région Nord Pas de Calais, les salariés des services à la personne représentent ainsi 70 000 personnes, soit le double de l'ensemble de la filière automobile.

 

Si des solutions à la crise conjoncturelle que subit le secteur ne sont pas apportées rapidement, licenciements et liquidations judiciaires vont s'accélérer dans l'année, avec pour conséquence de lourds coûts sociaux : affaiblissement des dispositifs de protection de l'enfance, de soutien et d'accompagnement à domicile des personnes dépendantes, des personnes en situation de handicap, d'aide aux jeunes parents... Pour le secteur de l'aide aux familles, c'est une catastrophe qui s'annonce si aucune réponse n'est apportée à l'augmentation de 8 à 12 %des coûts des charges salariales due à la suppression de l'exonération « Services à la personne ». La situation est dans l'impasse. La CNAF dit à ce jour ne pas avoir l'autorisation du Gouvernement pour mobiliser le budget non consommé de la Branche famille afin de compenser le surcoût. Un nouveau coup dur alors que les services d'aide à domicile pour les personnes âgées étaient déjà en difficulté, notamment en raison des problèmes budgétaires des départements.

 

Les acteurs de l'aide à domicile ont esquissé l'avenir en réfléchissant à un nouveau système de tarification, en lien avec l'Association des Départements de France. Mais cette réflexion ne répond pas à l'urgence. Le collectif de l'aide et du soin à domicile appelle donc les pouvoirs publics à réagir rapidement sur plusieurs points : prise en compte dans le code de la sécurité sociale des familles fragiles ouvrant droit à l'exonération « aide à domicile » au même titre que les personnes âgées et handicapées, déblocage d'un fonds de soutien sur deux ans pour les services en cas de défaillance des financeurs publics et en parallèle la révision du système de tarification, en partenariat avec les différents acteurs du secteur.

Les structures de l'économie sociale et solidaire que nous représentons, ne pourront se sortir des graves difficultés qu'elles connaissent aujourd'hui sans une réelle prise de conscience des pouvoirs publics.
Sinon, l'aide à domicile, en dépit de sa vocation sociale et solidaire, devra t-elle être considérée comme un luxe réservé aux moins  fragiles et aux plus aisés.

 

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